Presque la moitié des cavistes indépendants qui ont contribué à l’enquête en ligne réalisée par Equonoxe en fin d’année sur leur activité en septembre et octobre ont déclaré avoir organisé un évènement promotionnel du type foire (ou anti-foire) aux vins.
Le taux de cavistes, hors réseaux, qui organisent ce type d’animation de rentrée stagne année après année, même si les retombées mediatiques autour de ces foires ont incité de nombreux cavistes de renom, notamment dans les grandes villes et en région parisienne, à suivre ce mouvement impulsé par la grande distribution.
Voir synthèse en ligne dans les pages d’études réservées aux adhérents cavistes et partenaires sur le site professionnel www.cavistesprofessionnels.fr/pro.
Un marronnier teinté de folklore
Inventée en 1973 par l’un des fondateurs de l’enseigne E.Leclerc dans la ville bretonne de Landerneau, ce véritable outil de dynamisation des ventes de vins se veut pleinement intégré à la rythmique viticole puisque supposé permettre aux vignerons de faire de la place dans leur cuve en attendant la nouvelle vendange. Au-delà de ce vernis de tradition, la généralisation des foires aux vins de rentrée et la puissance médiatique qui leur est accordée a aussi été savamment orchestrée par les grandes enseignes pour accompagner la montée en gamme de leurs rayons vins.
Car l’enjeu d’image est au moins aussi important que l’objectif commercial en lui-même si l’on en juge des moyens consacrés à la communication de ces différentes foires et de l’intérêt suscité auprès de la presse, qui contribue au succès de la formule.
Un intérêt bienvenu pour nos univers de produits, dans un timing difficile car de transition, entre détente estivale et préparation des fêtes de fin d’année qui, bon gré mal gré, a conduit de nombreux cavistes à participer activement à l’évènement.
La rentrée 2018 a de toute façon été compliquée
Les premiers échos des foires aux vins 2018 évoquent des ventes en forte baisse dans la grande distribution.
En effet, selon les premiers bilans établis par IRI sur les ventes entre fin août et la mi-octobre, les ventes de vins dans la grande distribution en France chutaient en volume de 11% par rapport à l’an passé (– 12,3 millions de cols) et de 43 millions d’Euros (soit -7% par rapport à 2017).
La conjoncture maussade, constat qui a précédé même le soulèvement de gilets jaunes, pourrait suffire à justifier ces résultats négatifs. Voir Baromètre d’activité des cavistes de septembre-octobre sur le site professionnel des cavistes.
Trop de promotions tuent les foires ?
Mais le modèle semble atteindre ses limites si l’on en croit différents signaux.
Les concurrences exacerbées entre enseignes, aux parcs toujours croissants (45% d’hypermarchés en plus en dix ans), contribuent à la saturation de leurs propres ventes de vins et ce dans un contexte général défavorable aux consommations quotidiennes de vins.
Le renouvellement des clientèles amateurs de vins lui-même est en berne : selon Kantar World Panel, en 2017, 400 000 foyers avaient encore cessé d’acheter du vin.
Et la course effrénée au moins disant en termes de prix de ces dernières années, accentuée par les nouveaux opérateurs en ligne, a fini peut être par lasser des consommateurs. Il faut dire qu’ils étaient devenus tellement chasseurs de prix qu’ils en avaient oublié de juger de la qualité du trophée. L’époque est peut-être à revenir aux fondamentaux et à fuir les places de marché tapageuses et trop maquillées pour être bien honnêtes.
Ce qui ne peut que bénéficier aux cavistes.
Redynamiser le creux de l’automne
Contrairement aux grandes enseignes de la GD pour lesquelles les Foires aux vins de rentrée représentent parfois le principal temps fort de l’année, devançant même en termes de ventes celles de fin d’année, le poids des ventes imputables à leurs opérations commerciales de rentrée reste limité selon les cavistes participants.
Si un caviste sur 10 n’y voit aucun impact sur ces ventes, les autres y trouvent malgré tout un vrai intérêt qu’ils évaluent en moyenne à 7,9% du CA des deux mois imputable à l’opération.
La majorité des cavistes répondants ont plutôt organisé leur foire commerciale de rentrée sur la fin du mois de septembre voire en octobre. Les foires aux vins qui ont été organisées en octobre ont même eu davantage d’impact sur les chiffres d’affaires mensuels que celles de septembre.
Des temps médiatiques à préserver
Proposées comme échappatoire au stress de rentrée, les opérations qui ont été organisées dès début septembre, parfois pour devancer les foires tonitruantes de la grande distribution sont les plus exposées. En 2018, les cavistes qui ont organisé des foires dès septembre ont rapporté des reculs importants par rapport aux foires aux vins de 2017 (-8,5%) ; si recul il y a eu aussi en octobre, il se limite à 2% chez les cavistes concernés.
Des résultats tristounets, mais qui pour autant ne doivent pas détourner les cavistes de cette nécessité, de plus en plus, d’émettre des signaux attractifs.
Les nouveaux objectifs du gouvernement sont clairs : faire la chasse aux consommations quotidiennes d’alcools. Avec un cortège de mesures (voir article dans même Lettre d’informations des cavistes) qui menacent la pérennité des cultures traditionnelles de la convivialité gourmande et de l’accueil, le risque est réel de se retrouver enfermé dans des usages strictement codifiés et exceptionnels.
Alors, quel que soit le moyen, il nous faut, en synergie avec les autres acteurs de la production et de la commercialisation des vins et alcools, réussir à ne pas faire oublier cet art de vivre.
Les opérations d’automne, comme celles de printemps, sont essentielles pour rythmer l’année commerciale et surtout médiatique de notre secteur d’activité. Une tribune à saisir, quitte à l’adapter à nos spécificités de commerces spécialisés, mais assurément pas à enterrer…
Voir étude dans les pages d’études réservées sur le site professionnel des cavistes www.cavistesprofessionnels.fr/pro.