Il n’y a pas de fatalité en économie. C’est ce que démontrent les cavistes du SCP qui sont rentrés en phase de résistance active à une tendance que certains considèrent pourtant comme inéluctable, celle des ventes bradées par internet.
Rester l’avant-garde
C’est un fait, le développement des nouvelles technologies numériques et internet révolutionnent approches commerciales et relations aux consommateurs. Cette nouvelle grande révolution de la technique génère, comme l’avait fait à la fin du XIXème la machine à vapeur puis l’électricité, sa cascade de réorganisations économiques, sociales, consuméristes et fait évoluer les systèmes de valeurs des populations.
Les cavistes accompagnent et participent à la mutation de société en cours, parfois même activement ; rappelons-nous l’origine de certains sites de ventes de vins en ligne issus de stratégies visionnaires de cavistes cherchant associer activités physiques à activité de Ventes par correspondance devenues potentiellement plus « faciles ». Par contre, les pure players qui pensait d’emblée développer des modèles commerciaux totalement en ligne ont confirmé qu’en matière de vins, il est impossible de simplement décliner les modèles marchands classiques, les spécificités qualitatives du vin ne pouvant se résumer à une liste d’ingrédients ou de caractéristiques techniques objectives.
Nulle crainte, donc, coté caviste, des avancées permises par internet et les réseaux sociaux et tous ceux qui pratiquent les cavistes entendent comme le circuit bruisse d’idées, d’expériences, chacun participant actuellement à inventer le marché des vins de Demain. « L’arrivée du e-commerce est comparable à l’arrivée du train ou de l’avion. Nous ne l’arrêterons pas, par contre nous pouvons y apporter toute notre différence, tout notre savoir-faire » analyse Jerôme Guilluy, Directeur général de l’enseigne caviste La Vignery.
Des innovations majeures sont sans doute en train de naître, que ce soit par des nouveaux produits, des nouvelles organisations, pour communiquer et créer de nouvelles relations avec les consommateurs. Sur ce point, les cavistes suivent attentivement les évolutions des réglementations et veilleront à réagir en cas d’atteintes à leur capacité de communiquer sur leur activité dans les réseaux sociaux.
Rappelons que le terme de Communauté, régulièrement utilisé pour définir les groupes virtuels de personnes associées par les réseaux sociaux (facebook, twitter, …), garde son sens premier avec les cavistes, ces derniers ouvrant les yeux sur leur principale richesse, leur clientèle, grâce à la qualité du relationnel direct qu’ils ont su créer, entretenir et dynamiser… et que le virtuel ne pourra pas remplacer (voir l’édito de Yves Legrand du mois dernier sur le site du SCP).
Il ne s’agit donc pas de réflexes néo poujadistes (voire « passéistes ») lorsque les cavistes dénoncent aujourd’hui fermement la fuite en avant de leurs fournisseurs tentés, en ces périodes économiquement compliquées, par les opérations coups de poings de sites comme celle du site venteprivee.com … ou d’autres.
La goutte d’eau qui fait déborder un grand vase bien rempli
Le 23 mars 2014, Monsieur Granjon, dirigeant de vente-privee.com était interrogé lors du Salon de la Franchise, Porte de Versailles à Paris. Il dévoilait alors fièrement, et ce devant un parterre de commerçants, la stratégie parasitaire de l’entreprise qu’il a créée, entreprise par ailleurs régulièrement saluée par les responsables politiques qui, en ces temps moroses, ne veulent y voir que la partie visible de l’iceberg, à savoir la croissance et les gisements d’emplois (jetables, sur fond d’hyper rationalisation des organisations industrielles dignes des Temps_toujours très_Modernes de Charlie Chaplin).
La mécanique commerciale au cœur de ce succès repose sur la commercialisation au grand public de produits vendus par ailleurs par les réseaux prescripteurs, à des prix affichés comme inférieurs de 40 % aux prix publics chez les cavistes.
C’en est trop pour les cavistes présents qui digéraient déjà mal les opérations promotionnelles destructrices de valeur du site en question. Une déclaration qui a suscité, au-delà des réactions spontanées, une réponse collective des réseaux et responsables des cavistes indépendants adhérents du SCP. Ils ont donc rédigé un courrier que chacun depuis relaie à ces fournisseurs.
Inviter à davantage de vigilances et de visions stratégiques
Ce que dénoncent les cavistes, c’est la multiplication de modèles commerciaux s’appuyant sur leurs tarifs.
Les professionnels connaissent bien, pourtant, la valeur des prix publics pratiqués par les cavistes. Ces derniers sont même souhaités, la plupart du temps, par les producteurs eux-mêmes. Ce n’est pas pour rien s’ils servent de références. Mais avant de le devenir, les vrais professionnels savent comme ils sont difficiles à construire. Les voir ainsi brader interpelle donc ceux qui, en première ligne, assurent le travail de valorisation auprès des clients. Les impacts direct et indirect de ces opérations sont très destructeurs.
Pour de nombreux cavistes, les opérations promotionnelles basées sur des baisses importantes de prix de marque de spiritueux ou de signatures vigneronnes qu’ils vendent eux-mêmes non seulement ne valorisent pas l’offre commerciale proposée et n’apportent pas de réputation au produit, mais elles décrédibilisent leur propre positionnement.
« Les coûts d’un caviste sont liés aussi à son travail de sélection et de valorisation des vins. Piocher dans notre offre pour ne proposer aux consommateurs qu’une remise tarifaire dévalorise notre travail, mais aussi les vins» rappelle Dominique Fenouil, le dirigeant-fondateur du réseau de boutiques Le Repaire de Bacchus et président de la Communication du SCP. En effet, quoi qu’en disent les organisateurs, les raccourcis intellectuels sont faciles et les très nombreux consommateurs dits « zappeurs » ont vite fait d’associer un prix à une marque, et de considérer dans la foulée que le rabais est juste une mise à nue des marges réelles faites par les distributeurs spécialisés sur toute leur gamme.
Une concurrence essentiellement Marketing et logistique
Mais derrière le cas venteprivee.com, il existe de nombreuses autres stratégies purement opportunistes et totalement destructrices. C’est le cas du site showroom.com en décembre 2013 bradant à 10 jours de Noël à -30%/-40% des références par ailleurs vendues chez les Cavistes. Le site adressait ses offres dites « exceptionnelles » à des cibles de trentenaires, via sms, un media en effet plébiscité pour ces publics encore difficiles à recruter pour des cavistes « au four et au moulin » parfois débordés par la rapidité des communications via réseaux sociaux.
Le succès des sites qui vendent ainsi en ligne repose finalement essentiellement sur leurs compétences marketing et la dynamisation professionnelle de leur site auprès de cibles que les cavistes ont encore du mal à comprendre (moins de 30 ans) donc à recruter eux-mêmes.
Ces sites s’appuient ensuite sur des relais logistique qui parfois, en plus, impliquent de venir chercher les commandes chez des commerçants cavistes. « C’est d’autant plus rageant, témoigne M. Lacome, Caviste à La Cave de Lomagne dans le Tarn, que pour les colis de moins de 20 kg, les clients ayant acheté du vin lors des opérations de Noel sur showroom viennent les chercher chez moi, je me retrouve alors contraint de livrer les colis d’une concurrence déloyale. Pourtant, notre nombre et notre dispersion devrait permettre aux cavistes d’assurer une telle logistique auprès des consommateurs. »
Sur ces sujets, et ce alors que les cavistes français restent nombreux à revendiquer une forme d’indépendance plus proche de l’individualisme que de la réelle responsabilité autonome, les cavistes indépendants et chaines d’Amérique du Nord mettaient en commun dès le début des années 2000 leurs gammes sur des sites plateforme conçus comme des « grappes » capables d’attirer les consommateurs à la recherche de références précises et qui ensuite étaient renvoyés auprès des distributeurs spécialisés les plus proches de chez eux.
L’avis de : Dominique Fenouil, dirigeant et fondateur du Repaire de Bacchus, Président de la Communication du SCP
Preuve que la promotion tue le produit
Un prix dégradé au-delà de 20% terni durablement l’image du produit, argumente D. Fenouil auprès de VSNews, en réponse à l’article du DG de VP.com tentant de répondre à la dénonciation relayée par les cavistes. « Je parle d’expérience. Le Domaine de Bernas avec lequel nous travaillons, nous a demandé pour des contraintes de trésorerie de vendre son vin qui se vendait très bien à 12,90 € au prix promotionnel de 9,00 €. L’opération a eu un grand succès mais les ventes se sont écroulées une fois revenu le prix normal. Il a dû refaire une opération identique pour retrouver ses volumes et d’opération en opération la valeur perdue de son produit s’est dégradée. Aujourd’hui, nous l’avons positionné à 9,90 € en permanent et nous allons retravailler patiemment à le revaloriser. Dans le cas de vente-privee.com, nos ventes de champagne Moutard qui atteignaient 11 000 cols à 27,90 € sont descendues à 5-6000 bouteilles suite à une opération sur vente-privee.com au prix de 16,90 €. Nous vendons toujours autant de champagne mais face aux critiques, les vendeurs ont réorienté les consommateurs vers d’autres marques. En termes d’images et de marges, je doute que la maison Moutard tire un bilan positif de cette opération. Aujourd’hui, Delas qui vient de vendre son Hermitage 2008 à 24 € via vente-privee.com va devoir m’expliquer comment je vais pouvoir vendre son 2011 à 49 € ! Dois-je leur dire que le 2008 est indigne ? En attendant cette réponse, nous avons suspendu les commandes.
Les principales enseignes adhérentes au SCP : Nicolas, Cavavin, V&B, nous mêmes ainsi que les cavistes de la FNCI considèrent dorénavant les fournisseurs de vente-privee.com comme des fournisseurs de réseau discount. On ne peut pas tout avoir. Ainsi, Château Musar que nous avions fait déguster trois samedis de suite dans nos boutiques en respectant le prix de vente conseillé de 17,90 € a été déréférencé lorsque nous avons constaté que dans le même temps il était vendu à 9,90 € sur vente-privee.com.»
Entre Caviste et E-Low cost, il va falloir choisir
La boite de Pandore étant ouverte, les plaintes de cavistes se multiplient, dénonçant, comme ils le faisaient vis-à-vis de la grande distribution, des distorsions de concurrence insurmontables avec ce qui est pratiqué sur les sites de ventes par internet.
Récemment, l’information relayée auprès des cavistes indépendants de la vente des vins de Provence des Domaines Ott sur un site spécialisé à des tarifs inférieurs à ce que peuvent négocier les cavistes à l’achat auprès de la maison Roederer, qui distribue ces rosés, a réouvert la plaie.
Pourtant, à force de communication et de persuasion, l’information commence à être entendue par les vignerons souhaitant mettre en place une vraie stratégie commerciale pour leur production : si on veut concilier commercialisation directe et distribution par les commerçants professionnels, il faut concevoir en amont les tarifs, de façon à consacrer une marge suffisante et incitatrice au travail de référencement et de relais commercial assuré par le caviste. Pour cela, il faut pratiquer à la propriété des prix de vente comparables à ceux en vigueur chez les intermédiaires afin de ne pas inciter les consommateurs à court circuiter les intermédiaires cavistes, vecteur d’image, de visibilité, de réputation et élargissent le champ des ventes.
Mais le chantier semble encore immense pour faire passer le message du côté des « grandes marques ».
Chacun comprend pourtant la nécessité de ne pas vendre de produits comparables dans les circuits hard discount et les commerces spécialisés. Une réflexion à adapter aujourd’hui aux sites marchands présents sur la Toile.
Aller bien au-delà d’un simple « coup de comm »
Quels autres moyens de faire entendre leur intérêt pour les cavistes si ce n’est la tendance, consciente ou inconsciente, de nombreux cavistes, indépendants notamment, à ne pas référencer (voire à boycotter … et à le faire savoir à leurs clients) les marques « non-vigneronnes » ? Une réalité qui accentue le fossé entre le circuit des cavistes et les grandes marques de Négoce ou de Coopératives. Les marques de Champagne de par l’histoire inutile entre l’appellation et ses marques, se trouvent au cœur du débat.
Mais ce bras de fer ne mènera à rien voire même hypothèque la capacité de la filière (amont et aval réuni) à relever les défis actuels.
Suite à la lettre envoyée par les cavistes à leurs fournisseurs, de très nombreux soutiens se font connaître de la part de producteurs comprenant en effet les conséquences que ces opérations commerciales, motivées la plupart du temps par leurs besoins de trésorerie, entrainent pour leurs marques.
Grâce au dialogue initié au sein du Club Vino Semper entre cavistes et producteurs conscients des enjeux, les différentes parties cherchent et imaginent de nouvelles règles gagnant-gagnant. Car les partenaires Vino Semper comptent sur les cavistes et sont convaincus de leur valeur, ce que prouve leur adhésion à la démarche.
Pour Stéphane Lefebvre, Directeur Général de Thiénot France (110 M€ de CA en 2013, 10ème société de distribution en France de vins, Champagnes et spiritueux, filiale de distribution du groupe familial Thiénot Bordeaux Champagnes), la révolution Internet implique de repenser échelles et stratégies « Tous les acteurs du monde des vins, Champagnes et spiritueux se cherchent encore dans ce domaine de l’internet et chacun se demande comment appréhender ce nouveau média qui a surpris par la puissance de son offre « coup de poing » et la quantité de consommateurs touchés en même temps. Qui pouvait penser en 2006, alors que nous tentions les premières ventes de vins sur le site, que 100 000 btles de vins pourraient être vendues en 3 jours ? Même les dirigeants de venteprivee n’imaginaient pas cela lors de leur première opération de « vente évènementielle »…
L’avis de : Jerôme GUILLUY, Directeur général de l’enseigne La Vignery, 8 magasins cavistes
Depuis quelques jours il semble que l’intervention de Monsieur Granjon suscite les passions. Il est clair que s’en prendre au métier qui nous rassemble tous n’est pas agréable à entendre. Nous pensons que cette intervention devrait provoquer en nous une réaction positive et constructive. L’arrivée du e-commerce est comparable à l’arrivée du train ou de l’avion. Nous ne l’arrêterons pas, par contre nous pouvons y apporter toute notre différence, tout notre savoir-faire. Plutôt que condamner nos partenaires d’aujourd’hui qui choisissent de travailler avec Monsieur Granjon, que pouvons-nous faire pour les convaincre de le faire avec nous tous plutôt qu’avec lui ?
Sommes-nous capables nous tous, de nous entendre pour mutualiser ces « destockages » pour en faire bénéficier plutôt nos clients que ceux des pures players du web ?
Nous devrions remercier Monsieur Granjon pour nous ouvrir les yeux sur cette nécessité de nous fédérer encore plus pour au final encore mieux satisfaire nos clients.
Comment être plus forts tous ensemble face à cette nouvelle forme de commerce ? Comment faire pour capter « ses déstockages » inévitables pour en faire bénéficier nos clients ?– Comment mutualiser des savoirs faire logistique tous ensemble pour en faire bénéficier nos clients ? – Comment valoriser notre conseil par rapport à internet ?
En conclusion, n’ayons pas peur des pures players opportunistes du commerce web, mais profitons plutôt de cette opportunité qui nous est donne d’encore plus nous fédérer autour de cette nouvelle forme de commerce pour en faire bénéficier tous nos clients.
L’avenir nous appartient, soyons plus forts tous ensemble pour le rendre meilleur !
Et il faut aujourd’hui, comme auparavant avec la GD, attribuer à chacun son rôle et imaginer les stratégies dans le temps : Comme Lancôme a toujours su protéger son réseau de prescripteurs qui lui a rendu en retour un soutien sans faille, Thiénot France a déjà fait le tri entre ses marques ou châteaux « réservés » au monde des cavistes et de la belle restauration d’une part et celles, plus généralistes, qui s’adressent à la Grande distribution, à l’internet événementiel et à la restauration dite « commerciale » d’autre part. Ainsi, les maisons Joseph Perrier, Thiénot, Edmond de Rothschild (Châteaux Clarke, Malmaison, des Laurets), Janneau, Lindrum et Dourthe au travers des Châteaux le Boscq, Rahoul, Ricaud, Diane de Belgrave, Naudin Larchey, etc…), partenaires du Concours du Meilleur Caviste de France, ont fait le choix d’une distribution exclusive appuyée par des cavistes « conseil ».
Les dérives dénoncées actuellement sur fond de besoins de trésorerie interroge sur la bonne capacité des entreprises de la production à tenir leurs objectifs et donc sur la pertinence des stratégies qu’elles mettent en œuvre. Difficile pour les décideurs de ces structures, dans une filière institutionnelle reposant sur des représentations régionales et mots d’ordre syndicaux qui ont plutôt tendance à s’opposer qu’à se vivre comme des partenaires. Comment réussir à conduire sereinement de vraies stratégies dans ces climats conflictuels ? La mise en place progressive de mécanismes de réserves qualitatives dans les différentes régions d’appellation allège les tensions dues aux risques climatiques et ouvre des perspectives quant à consacrer davantage d’efforts vers l’aval afin de sécuriser des politiques de marques et de référencement. Mais il reste du chemin à parcourir. « Nous devrions tous aller dans la maîtrise et la valorisation et non dans la vente à prix cassée » résume ainsi Eric Henry, directeur Commercial du groupe Vranken-Pommery.
Un objectif collectif qui passe par la mise en place d’une mécanique de confiance, seul processus capable de créer la valeur des marques et des réputations « C’est en jouant le jeu mutuellement que nous nous renforcerons et chacun doit être dans son rôle en toute honnêteté et transparence entre partenaires » conclueStéphane Lefebvre.
Une réflexion naissante alors qu’apparaissent les premiers signes d’essoufflement du modèle purement opportuniste, certains opérateurs témoignant du fait que les opérations évènementielles sur les dits sites ne débouchent plus systématiquement sur des résultats exceptionnels, leur généralisation aboutissant à une forme de banalisation. Ils seront nombreux ceux qui y perdront à la fois prestige et positionnement, sans avoir résolu pour autant leur problème de déstockage…
Des besoins réels à solutionner
Dans tout partenariat durable, il convient que chacun s’entende et se comprenne. Et chacun, coté caviste, comprend aussi les réels besoins de solutionner des engorgements de stocks. Trop facile en effet de dénoncer les opérations de déstockage lorsque le « marché » refuse par exemple, les millésimes anciens de rosés, ou les vins issus de vendanges effectivement moins qualitatives …
Tout est une question de prix, rappelle D. Fenouil, et vu les tarifs concédés à venteprivee.com par les producteurs, même les cavistes sont capables de proposer des offres de déstockage à bas prix. Et au moins seraient-ils aussi capable d’expliquer le différentiel de prix afin que celui-ci ne remette pas en cause les positionnements « normaux ».
L’idée fait son chemin, en effet, et des premiers et dynamiques échanges par mails démontrent une énergie prête à avancer. Un véritable challenge, fédérateur et motivant, résume Jerôme Guilluy : « N’ayons pas peur des pures players opportunistes du commerce web et profitons plutôt de cette opportunité qui nous est donnée d’encore plus nous fédérer autour de cette nouvelle forme de commerce pour en faire bénéficier tous nos clients ». Comment être plus forts tous ensemble face à cette nouvelle forme de commerce ?Comment faire pour capter « ses déstockages » inévitables pour en faire bénéficier nos clients ? Comment mutualiser des savoirs faire logistique tous ensemble pour en faire bénéficier nos clients ? Comment valoriser notre conseil par rapport à internet…
Des questions à aborder lors de la prochaine AG du SCP (27 mai 2014), entre indépendants, cavistes de réseaux et modèles d’entreprises différents pour transformer ce « coup de gueule » en opportunité d’avancer ensemble.
L’avis de : Stéphane Lefebvre, Directeur Général de Thiénot France (110 M€ de CA en 2013, 10ème société de distribution en France de vins, Champagnes st spiritueux, filiale de distribution du groupe familial Thiénot Bordeaux Champagnes)
« Nous vivons en ce moment une révolution identique à celle que nous avons vécu dans les années 70 avec l’explosion des hypermarchés. Après avoir terriblement souffert les cavistes ont su démontrer leur capacité à résister aux hypermarchés et même à se développer à nouveau à partir de la fin des années 90 car ils ont une force unique : le conseil.
Internet révolutionne tellement tous les pans économiques de la société que certains experts annonçaient déjà en 1999 la disparition des hypermarchés pour 2025 et le renfort des magasins de proximité…d’autres études menées par de grands cabinets de consulting annoncent que la vente de vins sur internet pourrait atteindre 20 à 25% du total de la filière en 2025 et il n’est nul besoin ici de parler de l’explosion des « Drive ». Internet est donc incontournable pour qui veut vivre avec son époque. Tous les acteurs du monde des vins, Champagnes et spiritueux se cherchent encore dans ce domaine de l’internet et chacun se demande comment appréhender ce nouveau média qui a surpris par la puissance de son offre « coup de poing » et la quantité de consommateurs touchés en même temps. Qui pouvez-penser en 2006 que 100 000 btles de vins pourraient être vendues en 3 jours ? Même les dirigeants de venteprivée n’imaginaient pas cela dans leur plus beaux rêves lors de leur première opération de « vente évènementielle ». Solder des fins de série se pratique dans le monde du textile tous les ans et cela deux fois par an…on fait place nette à la nouvelle collection. Le risque c’est que certains consommateurs n’achètent plus qu’en Soldes ! Quelle est alors la vraie valeur de la marque ? Les grandes marques de luxe sont-elles soldées ? Les grands vins ou les vins « boutique » doivent-ils être soldés ? Pour les marques de grande diffusion, « multicanal » comme on dit aujourd’hui, le problème est certainement différent de celui des marques « boutique », des marques de prescripteurs.
En s’engageant comme premier partenaire de Vino Semper et en proposant au SCP d’organiser le Concours du Meilleur Caviste de France, Thiénot France a voulu marquer son soutien au monde des cavistes, au travers d’un investissement humain et financier hors normes. Thienot France n’est cependant pas philanthrope. Comme Lancôme a toujours su protéger son réseau de prescripteurs qui lui a rendu en retour un soutien sans faille, Thiénot France a déjà fait le tri entre ses marques ou châteaux « réservés » au monde des cavistes et de la belle restauration d’une part et celles, plus généralistes, qui s’adressent à la Grande distribution, a l’internet événementiel et à la restauration dite « commerciale » d’autre part.
C’est par la différenciation de sa distribution qu’une marque se positionne sur son marché comme lorsque Audi et Volkswagen ont décidé de faire concession à part avec tout le succès que l’on connaît pour ces deux marques chacune sur un positionnement bien spécifique. Partenaires du Concours du Meilleur Caviste de France, les maisons Joseph Perrier, Thiénot, Edmond de Rothschild (Châteaux Clarke, Malmaison, des Laurets), Janneau, Lindrum et Dourthe au travers des Châteaux le Boscq, Rahoul, Ricaud, Diane de Belgrave, Naudin Larchey, etc…) ont fait le choix d’une distribution exclusive appuyée par des cavistes « conseil ». C’est en jouant le jeu mutuellement que nous nous renforcerons et chacun doit être dans son rôle en toute honnêteté et transparence entre partenaires.
L’internet continuera à renforcer son audience, mais les jeunes de 25 à 30 ans aujourd’hui rechercherons toujours un lieu de convivialité pour partager leur passion entre amis. Ce lieu est, et restera, la Cave car l’achat « plaisir » se développera dans les boutiques. Comme toute activité nouvelle l’internet événementiel ne pourra pas faire l’économie de sa propre analyse et de son avenir… avec ou contre les cavistes et cela passe certainement par le dialogue entre opérateurs qui ont tous un intérêt commun : le consommateur amateur de bons vins, spiritueux et champagnes ».