Retour sur 2 mois et demi de crise
En mars 2020, le cours de nos vies a changé.
Quoique les historiens du futur raconteront de la période, nous avons vécu depuis une période extra-ordinaire, au sens propre du terme.
Cette « guerre » du covid19, puisque c’est le terme qui a été utilisé de façon très sérieuse par le président Macron, n’était pas faite de bombes, de destructions, de sang ou d’exodes massifs de réfugiés misérables. Elle a été au contraire silencieuse, les vies sociales de chacun ont dû s’arrêter net, les douleurs ont été vécues seuls.
Voici venu le temps …
Rappelons-nous la sidération qui a suivi l’allocution présidentielle du 12 mars 2020. Qui s’attendait à des annonces aussi brutales ? Fermeture des écoles et des lieux publics, mise en quarantaine de tous ceux suspectés de transmettre le virus, isolement des personnes âgées, etc.
Mobilisation générale pour organiser le confinement de toute la population à domicile.
Puis, le confinement. « Face à la crise sanitaire que nous connaissons, nous devons faire bloc ».
Et la méthode a été : tous aux abris. Et la suite a donné lieu à l’organisation d’une véritable économie de guerre permettant d’assurer la sécurité de la population et de l’alimenter. Et d’éviter la panique.
Partout, les appels à la fermeture citoyenne pour résister à l’avancée du virus. Les réflexes très humains de mises à l’abri des équipes, de protection des siens. Même dans les plus grandes sociétés, des chefs d’entreprise ont eu des élans d’empathie sincères invitant chacun à se mettre l’abri. « La peur d’un virus du type Ebola ! analyse Hervé Gomas, qui dirige trois caves dans l’Essonne.
« J’ai fermé les 10 premiers jours » précise Stéphane Profit, caviste de Colombes qui a vécu cette crise complètement à contre-courant. « Sur le moment le choc a été dur ! Il a fallu accuser le coup, comprendre ce qui se passait. Je sortais en plus d’une période épuisante, sans pause depuis les fêtes de fin d’année, je devais même prendre quelques vacances et là, gros coup de fatigue, j’ai eu besoin de faire une pause, c’était le moment ».
« Le premier jour, on est resté ouverts partout » se rappelle Arnaud Dupuis, Directeur de la chaine de magasins Cave du Val d’Or, implantée dans les régions Est de la France. « Résultat : – 70%. Donc j’ai tout fermé sauf un magasin. »
« Nous on a fermé une seule boutique, celle située à Plan de Campagne, précise François Blohorn, gérant de cinq boutiques (et bientôt six) dans la région marseillaise (La route des Vins), pour recentrer sur les autre sites ; et on a respecté les choix de nos salariés : ceux qui ne voulaient pas travailler sont restés chez eux, les autres ont eu une petite prime pour les motiver et ont travaillé avec des horaires allégés ».
Stop, on commence à réfléchir !
Le 11 mars déjà, le SCP adressait en effet à ses adhérents les premières informations concernant le dispositif d’accompagnement des entreprises afin de rassurer les chefs d’entreprise et leurs salariés : la priorité était d’éviter la diffusion du virus, les contingences économiques seraient assurées par l’état qui ouvrait les vannes en matière de financement.
Mais l’annonce du confinement généralisé a commencé à « classer » progressivement les différentes catégories sociales : ceux qui allaient au front, ceux qui se confinaient, le tout sur fond d’angoisse généralisée et d’incertitudes mal canalisées.
Chacun a dû trouver sa place, son rôle, trouver le cas de figure qui lui correspondait, mettre en place le dispositif le plus adapté à son cas personnel, à sa structure, à ses équipes. Et qu’est-ce qu’il en est des cavistes ? Alimentaires ? Essentiels ? Superflus ? Honteux ? Indécents ? … La débandade !
« OUI, les cavistes sont autorisés à ouvrir (pour le moment en tous cas) sous réserve que soit ils sont immatriculés en tant que 4725Z soit ils disposent de la Licence de vente à emporter. » L’intervention de Patrick Jourdain, président du SCP, dès le samedi soir a été le point de départ d’une reprise en main générale côté cavistes dont on perçoit les conséquences, positives, aujourd’hui.
Et … qu’est-ce qu’on fait maintenant ?
Les cavistes qui sont restés ouverts pendant toute la crise l’ont été chacun pour des motifs qui lui sont propres. Chaque cas a été différent.
En commençant par « Bien obligé, je ne peux pas me permettre de fermer la boutique, il y a des charges à payer ».
« On est resté ouvert parce qu’on en avait le droit », précise Blandine Conan, caviste à Plelin le Grand (35), « et que c’était une chance par rapport à nos confrères restaurateurs qui ne pouvaient pas le faire. La solidarité, c’est d’éviter au maximum de demander des aides pour que ceux qui en ont le plus besoin puissent eux en bénéficier. Moi je n’ai demandé aucune aide ».
Et puis aussi parce que difficile de prendre une décision dans cette panique générale.
« J’étais désemparé je crois, j’attendais avant de prendre une décision. De toutes façons, ma femme était réquisitionnée pour s’occuper des enfants du personnel soignant, je n’allais pas rester à la maison tout seul sans rien faire. On vivait déjà au cœur du virus » se souvient Hervé Gomas, caviste en Essonne, qui a gardé son site principal ouvert pendant toute la crise, mettant par contre en activité partielle ses collaborateurs. « Et puis deux-trois jours ont passé, je n’avais finalement pas fermé, les choses se sont mises en place et l’activité a repris petit à petit ».
« Il a fallu trouver comment s’équiper, trouver des masques, du gel hydroalcoolique, il n’y avait rien » rappelle Stéphane Profit. Tout s’est joué sur les capacités d’adaptation des cavistes et sur les trésors de réorganisation qu’ils ont su développer : « Le fait d’habiter à proximité de ma cave m’a permis d’ouvrir tout en étant confiné avec une fourchette horaire très large, j’ai juste laissé mon portable sur la vitrine pour que mes clients me préviennent et ne trouvent pas porte close » explique Marco Bertossi, à Castelnau les Lez (34).
A saint-Malo, même scénario de fin du monde : « Les quinze premiers jours, on a fermé la boutique et juste communiqué sur les réseaux sociaux pour informer nos clients qu’on pouvait faire des livraisons. La ville était complètement morte, les gens terrés chez eux, mêmes les bateaux étaient à quais.
Seules les rues vraiment commerçantes du centre ville, avec beaucoup de métiers de bouche, ont pu un peu s’en sortir. Mais de là où on était il n’y avait rien » se rappelle Thierry Jouan (Aleth Vins Bière&Cie).
« J’ai tout de suite commencé à faire des livraisons pour les gens qui ne sortaient pas de tout de chez eux » se rappelle B Conan (Les Caves de Merlin – 35) « Et j’ai décidé de garder les mêmes horaires d’ouverture qu’avant la crise, par solidarité pour ceux qui travaillaient jusqu’à 18h, qu’ils puissent trouver un peu de lumière en rentrant. Parce que sinon, comme les autres commerces ouvraient sur des plages horaires très réduites, ils ne trouvaient plus rien de vivant en rentrant alors que ce qu’ils vivaient humainement était difficile » ;
« J’avais décidé de rouvrir mais de façon partielle, explique Stéphane Profit, donc seulement de 15h à 19h et seulement du mercredi au samedi, une manière solidaire de jouer le jeu, de contribuer à éviter la propagation du virus. »
« Tout de suite on s’est organisé avec les autres commerçants du village et on a lancé le click & collect , rebondit Hervé Gomas. On a été aussi immédiatement dotés de masques par la commune ; mon magasin servait régulièrement de lieu de collecte.
Et finalement ce n’était pas particulièrement un problème de rester ouverts car finalement il n’y avait personne dans le magasin donc les risques de contamination étaient minimes. Mais sur le mois de mars j’ai quand même fait -57% donc ce n’était pas la joie ».
Et après les premiers jours sont passées les premières semaines.
Le rôle du commerce de proximité
Et la vie a repris. Ou plutôt, elle a continué, sur fond d’attestations de sortie, de solitudes qui pèsent ou de logement qui deviennent un peu exigus.
Et les cavistes se sont sérieusement retroussés les manches :
« Au bout d’une semaine, nous avons réouverts tous les magasins, mais en adaptant les horaires : un employé par magasin donc ouverts 35h par semaine seulement, et avec un seul client à la fois dans la boutique » poursuit Arnaud Dupuis.
« J’ai été seul à travailler pendant le confinement avec une aide ponctuelle de mon associé pour les livraisons que nous avons proposées avec succès. J’ai dû très rapidement réagir en adaptant mon offre à la demande de l’instant » explique Marco.
« Dans mon quartier, d’habitude les gens partent en week end, en vacances, se déplacent beaucoup. Et là, pas de transport en commun, les routes bloquées.
Donc ils ont découvert leur commerce de quartier. Il y avait des queues énormes chez tous les commerçants. Nous on avait la plus petite de la rue en fait », s’amuse Stéphane.
« On a eu un vrai rôle social en fait, tout de suite : les clients qui d’habitude passaient et ressortaient en 4 minutes, là, ils discutaient pendant au moins un quart d’heure, ils en avaient besoin, de discuter ; nous avons joué pleinement notre rôle de commerce de proximité » reconnait Blandine.
« A Marseille, contrairement aux échos que je pouvais avoir de Paris, le confinement a été vécu sans stress » précise François Blohorn. Les gens étaient confinés mais quand ils sortaient, ils venaient faire des grosses commandes. Et comme en même temps nous avons accueilli davantage de clients (sans doute en partie aussi du fait de la fermeture de cavistes à proximité), nous y avons gagné sur le panier moyen comme sur la fréquentation quotidienne ».
« En fait nos magasins ont joué pleinement leur rôle de magasin de proximité : c’est même la boutique qui est située dans un quartier plus populaire que les autres qui a fait les plus grosses progressions de CA sur la période. C’est d’ailleurs la seule qui a vu ses ventes de BIB progresser un peu ». En fait il n’y a que celle située dans la grosse zone commerciale périphérique qui a souffert.
Des achats de plaisir et de réconfort
«Chez nous, les clients ont plutôt bien mangé et se sont fait plaisir, rapporte F Blohorn, qui rapporte des ventes qui ont progressé en volume. Dans nos caves situées dans des quartiers plutôt chics, la vente en hausse des belles bouteilles a permis de conserver un prix moyen de ventes stable malgré les ventes de Champagne réduites à néant alors que normalement cela représente 30-40% de notre CA. »
Et de se réjouir de n’avoir jamais vendu autant de caviar que pendant le confinement.
Le champagne a souffert de l’absence de célébrations pendant la crise. C’est le cas aussi chez Cave du Val d’Or a contrario des BIB qui sortent très gagnants de la période. « Y compris par correspondance », confie Simon Tran, le dirigeant du réseau spécialisé BiboVino qui a vu ses stocks fondre très rapidement.
Même son de cloche chez Agrappa, la Cave de Stéphane Profit, quartier de banlieue proche de Paris.
« Zéro champagne, pas de whisky » regrette t’il, « mais beaucoup de petites références à 3-5-7 euros, le genre de bouteilles que je n’ai pas forcément beaucoup en magasin donc il a fallu rapidement se réapprovisionner. » confirme Stéphane Profit.
L’état de crise sanitaire lui a finalement permis de rentrer pleinement dans l’univers du commerce de proximité.
« J’avais prévu d’ouvrir du mercredi au samedi de 15h à 19h. Mais en fait, je n’ai jamais fermé avant 20h. Et le matin, les livraisons arrivant finalement au matin, donc dans la rue directement, à l’heure où les gens du quartier vont faire leur course chez les commerçants du coin, et voyant la porte de la boutique ouverte, et bien ils s’arrêtaient, forcément : je n’allais quand même pas les forcer à ressortir l’après-midi et à refaire une attestation de sortie », explique t’il. « J’ai vendu des bières, des liqueurs, des alcools que d’habitude on ne vend jamais, que les gens d’habitude n’achètent pas chez les cavistes, comme du Vermouth, du Rivesaltes, du Lillet ».
« Les ventes pendant le confinement ont été surtout des vins de consommation courante, des BIB notamment, qui ont permis à des clients jusque-là réticents pour ces formats de les tester. Des clients qui renouvelleront du coup. » raconte Thierry.
On récupère ce que l’on s’aime
Mais que de boulot pour y parvenir. « J’ai travaillé deux fois plus pendant toute la période. Le lundi réassort et envoi des propositions commerciales et préparation des tournées de livraisons. Mardi, livraisons dans Paris et au-delà [Stéphane a posté pendant toute la période sur sa page facebook des photos et vidéos surréalistes de ses livraisons dans un Paris complètement vide et désert]. Et puis boutique ouverte du jeudi au samedi avec un fort afflux de clients ». « Finalement j’ai réussi pendant cette période à réaliser enfin le chiffre d’affaires normal qu’il aurait fallu que je réussisse depuis des années » analyse t’il un peu amer.
« j’ai proposé de nombreuses promos confinement, puis j’ai imaginé un coffret confinement de 12 bouteilles fonctionnant selon le principe du calendrier de l’avent, chaque compartiment pouvant s’ouvrir séparément avec un choix équilibré de bouteilles au prix moyen de 10€.
Pour chaque bouteille, j’ai joint un petit billet descriptif du vin avec conseils de service, accords… cela a rencontré un franc succès. » se félicite Marco.
« Le click & collect s’est mis à bien fonctionner. Et les ventes en livraison se sont multipliées. Les clients nous envoyaient des courriers de soutien. Nous ont remercié. Ça a donné du moral et les semaines ont passé » (Hervé Gomas).
Même son de cloche chez François de La Route du Vins à Marseille, qui dit avoir reçu « des félicitations permanentes, des clients qui nous disaient, bravo d’être ouverts ».
« A partir de début mai, il y avait toujours un seul employé par magasin, mais cette fois-ci nous autorisions cinq clients à la fois dans le point de vente » explique Arnaud Dupuis, évoquant des chiffres d’affaires en très fortes baisses pendant toute la période. « Mais il y a eu vraiment des beaux moments humains au sein de l’équipe, s’émeut le dirigeant de la chaîne de cavistes Cave du Val d’Or quand il explique que pour éviter les licenciements et fermetures de sites, chacun a su faire les efforts qu’il fallait.
« Nous avons gagné des nouveaux clients je pense, des gens qui ont partagé avec nous des moments importants. Même des gens qui étaient en confinement dans la région et qui, quand ils sont repartis, sont venus nous dire au revoir en nous disant merci d’avoir été présents pendant la période. Ca fait chaud au cœur » constate Blandine.
«60% de notre activité en temps normal dépend des bars et établissement restaurateurs donc nous attendons vivement leur reprise. Mais pendant toute la période nous avons gardé le lien avec eux, car humainement c’est difficile ce que l’on a vécu tous. Et je sais que ces professionnels qui se retrouvaient contraints avant la crise de constituer des stocks d’opportunités imposées par les conditions de vente des gros brasseurs n’en veulent plus. Ils vont encore plus apprécier la possibilité de se réapprovisionner par petites quantités, donc par nous. »
Une carte à jouer pour les cavistes ?
La période révèle en effet des opportunités permettant au détaillant qu’est le caviste de valoriser ces atouts. Plusieurs cavistes, notamment dans la région lyonnaise, disent bénéficier des repas entre amis davantage à domicile, avec des belles bouteilles qu’ils n’osaient pas s’offrir au restaurant.
A voir si ces clients qui redécouvrent la réalité des tarifs des belles bouteilles vont s’habituer à les acquérir chez leur caviste.
Et maintenant ?
Rien n’est encore bien stabilisé aujourd’hui. Et il faudra du temps pour réussir à dresser un bilan de ces deux mois de confinement. Ce qui est sûr c’est que mai a été un bon mois chez la plupart de nos interviewés, qui avaient parfois déjà retrouvés sur la fin du mois des niveaux d’activité « normaux » voire euphoriques.
Petit bémol cependant à Saint Malo chez Thierry Jouan et Delphine LeBerthe, très dépendants du tourisme et de l’activité des bars et restaurant locaux, ainsi que des anglais, toujours pas revenus. « Je reconnais que je n’ai pas forcément beaucoup cherché à communiquer pendant le confinement» avoue cependant Thierry, peut être que cela m’aurait permis d’améliorer les résultats ». Mais les touristes allemands, hollandais sont, eux, de retour, ce qui réjouit le caviste breton qui juge que la saison s’annonce bien même si la fête des pères est restée, malgré quelques belles bouteilles, modeste quand même. « On compte sur juillet-août pour revenir à un niveau normal ». Même si « ce qui a été perdu le restera ». Et de saluer l’utilité des dispositifs de soutien aux entreprises qui vont permettre de tenir. « Et merci aux informations relayées par le SCP durant toute la crise ; elles nous ont permis d’avoir toujours quelques jours d’avance sur nos comptables donc de pouvoir réfléchir avant la cohue sur les bonnes stratégies à tenir et bien gérer la période ».
« Depuis fin mai, c’est le retour à la normal. Mais dans mon cas ça veut dire un niveau de fréquentation insuffisant », regrette Stéphane qui dit avoir vécu une fête des pères « correcte ». Mais année après année, les résultats de sa boutique progresse et la rénovation en cours de son quartier lui permet de voir l’avenir positif, cet épisode de crise ayant permis selon lui à de nombreux publics de découvrir l’univers des cavistes, d’y voir des bouteilles bien moins chères que ce qu’ils pensaient, des gammes sympas et un cadre d’achat autrement plus agréable que celui de la grande distribution. Et les nombreux retours que lui ont fait ses clients pendant le Covid lui font plaisir.
« La Dolia a ouvert le temps du confinement avec certes une baisse significative du CA (-40%) mais globalement nous n’avons pas creusé de gros déficit et c’est bien là l’essentiel » se félicite Marco.
Retour à la normale aussi pour Blandine Conan : « On travaille comme avant » constate t’elle, avec une montée en puissance qui a commencé une semaine avant la fête des pères, qu’elle juge exceptionnelle.
« Depuis mi-mai on cartonne comme jamais, se réjouit Hervé Gomas. Mais toujours en respectant bien strictement les gestes barrières.
Même le fameux week end de fête des pères. J’ai explosé mes records et même rattrapé les pertes des derniers mois.
Mais sans jamais déroger aux règles de sécurité : les gens n’entraient qu’un par un dans la boutique et attendaient dehors avant de pouvoir rentrer ».
Un premier bilan
« La structure de clientèle a changé, les entreprises bien sûr ont tout arrêté mais j’ai gagné beaucoup de clients particuliers que je pense conserver durablement » analyse Hervé. Et la marge sur ces clients particuliers n’étant pas la même que sur les clientèles professionnelles, la profitabilité de l’entreprise s’y retrouve.
Même constat pour Arnaud Dupuis, qui a tablé sur la forte évolution de son mix produit, bien meilleur grâce au poids croissant des ventes aux particuliers, pour sécuriser sa trésorerie pendant la crise. Renégociant en parallèle les loyers de ses points de vente, il a pu ainsi bien négocier ses réapprovisionnements et se dit confiant pour l’avenir.
« J’ai gagné des nouveaux clients, c’est sûr, plus jeunes » constate aussi François Blohorn, qui au final a augmenté ses CA de mars, avril et mai. Et ouvre sa sixième boutique comme prévu fin juin.
«Ce que je retiens de ce confinement c’est qu’il nous faut être réactif, créatif et toujours plus à l’écoute et communiquer 2 fois plus et 2 fois mieux. Au final je pense avoir consolidé voire enrichi ma clientèle » se félicite Marco à la fin du confinement.
La crise a révélé les forces et les faiblesses et ceux qui ont su se remettre en cause s’en sortent mieux que les autres.
« Maintenant, j’ai presque plus de stocks dans ma boutique qu’en temps normal » remarque Stéphane qui finalement a peut-être trouvé son positionnement pendant la crise. Il a d’ailleurs revu l’organisation et la présentation de sa boutique, remplie aujourd’hui de bouteilles pour ne pas « ressembler pas aux magasins d’Europe de l’Est d’avant la chute du mur »
Finalement ces cavistes récupèrent les fruits du travail de réorganisation qu’ils ont su mettre en œuvre pendant la crise. Et aussi leur capacité à innover et à susciter l’envie malgré l’ambiance dépressive générale.
Comme tout crise, la période de confinement a servi d’accélérateur à quelques tendances de fond : ventes en ligne à partir du point de vente, livraisons, confirmation de la pertinence des formats BIBs, force de la proximité et du relationnel direct. Les cavistes ont été des observateurs de premier plan de l’état de la société française qu’ils ont accompagné durant toute la période. Leurs clients leur en sont gré.
A nous tous maintenant de démontrer à ces nouveaux consommateurs que les cavistes sont des commerçants du quotidien, un lieu d’humanité dans lequel il est agréable de se rendre.