Comme toutes les entreprises de l’hexagone, les cavistes sont tenus de respecter les délais de paiement légaux fixés par l’état.
Ces délais sont régulièrement raccourcis afin de fluidifier les relations entre acteurs économiques.
Les services de la DGCCRF accentuant leurs contrôles dans les entreprises, plusieurs cavistes ont récemment fait l’objet d’avertissements. La Commission Relation fournisseurs et Concurrence du SCP réfléchit donc aux moyens d’adapter les contraintes de ce cadre aux spécificités du modèle d’entreprise Cavistes (Voir notre article : La trésorerie pour les cavistes : un enjeu à partager avec l’amont de la filière).
Un horizon législatif à construire
Nos premières démarches auprès des services du Ministère de l’économie ouvrent un chantier qui sera sans doute long et complexe.
Pas évident en effet de faire accepter une dérogation à la loi qui tienne compte du poids forcément très lourds des stocks des cavistes.
Ces derniers peinent en effet parfois à régler leurs fournisseurs dans les temps exigibles par la loi LME (30 jours fin de mois pour les alcools et 60 jours pour les vins) et il faudra mettre en place une vraie stratégie intégrant les représentants de tous nos fournisseurs. Rappelons que le métier traditionnel du caviste est de sélectionner et réserver dès en amont des vins qui nécessiteront du temps de vieillissement avant commercialisation et consommation par les clientèles. Or, l’insuffisance de la valeur ajoutée nécessaire au financement de ces immobilisations a conduit depuis souvent très longtemps, voire plusieurs générations, les cavistes et les vignerons à mettre en place des systèmes de facturation-règlement clairement plus souples que ce que la loi exige.
Une situation qui risque de mettre du temps à être entendue par les raisonnements très juridiques et techniques des cabinets de Bercy, surtout en cette période de flottement avant élections.
Sécuriser l’immédiat grâce à la BPI
Compte tenu du niveau des sommes dues en cas de contrôle révélant une faute en la matière (et qui toucheraient non seulement le mauvais payeur mais aussi son fournisseur-créditeur devenu fautif d’accepter ainsi le contournement de la loi), une des solutions immédiatement applicables pour rassurer et sécuriser la trésorerie des cavistes professionnels serait sans doute d’utiliser le dispositif spécialement mis en place par la Banque Publique d’Investissement (BPI). Il s’agit du « bras armé » de l’État pour financer ses politiques économiques.
Afin de renforcer la trésorerie des PME et qu’elles puissent répondre aux contraintes posées par la loi LME, la BPI a créé un Fonds de garantie « Renforcement de la Trésorerie ».
Une solution certes technique mais qui a le double mérite de répondre aux besoins des cavistes de pouvoir « écrêter » leurs accidents de trésorerie structurels en allégeant leur coût financier, tout en permettant à la profession de participer à la remise en état du tissu économique du pays. L’allongement des délais de paiement fragilise en effet toujours, en premier lieu, les plus petites structures.
Lors d’une réunion avec le SCP au siège de la BPI, son Directeur du Financement de l’immatériel et de l’Incorporel de la Direction du Financement et ses responsables ont particulièrement insisté sur la toute dernière actualité de ce dispositif déjà récent : « les banques ont reçu sur ce fonds une délégation de décision, qui leur donne la possibilité de décider de garantir leurs propres crédits jusqu’à 200 KE. Elles peuvent ainsi répondre plus facilement aux demandes soumises par les emprunteurs. » … et ne pas se réfugier derrière un prétexte au montage de dossier pour ne pas se saisir de cet outil mis à disposition des TPE et PME par l’intermédiaire de leurs agences bancaires.
Comment ça marche ?
« Cette garantie s’adresse à des entreprises saines, de plus de 3 ans, affectées par une modification structurelle de leurs délais de paiement imputable à la mise en œuvre de la LME »
La BPI se porte caution à 50% d’un Crédit de consolidation des fonds de roulement aux TPE-PME (Fonds de garantie « Renforcement de la Trésorerie ») qui prend la forme d’un crédit par tirage (emprunt) de 2 à 7 ans.
Cette caution réduit du coup le risque pris par la banque, risque qui lui permet de prétendre à une rémunération rendant souvent ces accidents de trésorerie très lourds pour le caviste.
Par ailleurs, le fait qu’il s’agisse d’un crédit par tirage permet de ne pas avoir à utiliser (et donc rembourser) les sommes non utilisées mais au contraire de se servir de cette réserve pour atténuer les moments de détresse de trésorerie, comme un coussin de protection contre les aléas, étant entendu que le caviste dépend de rythmes saisonniers parfaitement visibles sur sa courbe de trésorerie et qu’il(elle) pourrait ainsi mieux gérer.
L’intérêt du dispositif est qu’il apporte une souplesse d’utilisation pour un coût qui est celui des taux d’intérêt de moyen terme, donc un prix de l’argent largement inférieur aux coûts facturés par les banques en cas de découverts, de lignes de trésorerie de court terme ou d’accidents de paiement.
La mise en place de ce dispositif est extensible à 15 ans si il est assorti d’une sureté sur un actif immobilier ou en cas de cession bail immobilière. La BPI ne prélève que 0,70% environ d’intérêt pour financer cette garantie (+ tx d’i moyen terme de la banque) mais la garantie BPI peut aller jusqu’à 1,5 M €.
Des banques à sensibiliser
Depuis quelques semaines, la banque commerciale n’a pas besoin d’attendre l’accord de la BPI pour mettre en place ce dispositif de couverture jusqu’à 200 K € (donc plus besoin de monter un dossier spécifique pour la BPI).
Les banques communiquent actuellement assez peu auprès de leurs chargé(e)s de clientèle locaux sur ce dispositif certes récent mais qui impose ainsi aux agences bancaires de remplir un rôle de relais par rapport aux politiques économiques nationales que certaines peuvent avoir du mal à admettre. Par ailleurs, il faut bien admettre que la rémunération de risques potentiels est le fonds de commerce de la majorité des banques commerciales qui se voient donc ainsi privées de revenus.
Raison de plus pour les informer ou leur rappeler le cas échéant l’existence de ce dispositif destiné au financement de l’économie et auquel les cavistes ont droit dès lors qu’ils répondent aux conditions demandées.
Comment monter un dossier de financement BPI ?
L’entreprise :
1/ prépare un dossier contenant les informations suivantes :
Ø l’analyse de ses besoins en fonds de roulement actuel et son évolution après impact de la LME.
Ø les bilans, le compte d’exploitation et le plan de financement prévisionnel ;
2/ présente son dossier à ses partenaires bancaires habituels afin de monter un crédit à moyen terme
… et 3/ pour plus de certitude, associe à son dossier à la notice explicative qui devrait permettre à son chargé de clientèle de comprendre d’emblée de quoi il est question ! Demandez-la nous au scp@cavistesprofessionnels.fr
Si besoin, n’hésitez pas à contacter la Banque de France, autre acteur de l’État, qui prévoit de mettre en place prochainement dans chaque région un correspondant TPE pour également faciliter les relations sur le terrain entre les besoins des entreprises et les agences bancaires régionales.
Le caractère très récent de ce dispositif explique sans doute en partie la relative méconnaissance des agences régionales. La BPI a réuni tous les sièges bancaires nationaux le 31 mars afin de les y sensibiliser. Suite à notre réunion, ses dirigeants ont compris la nécessité de rappeler aux professionnels de la finance que le dispositif est valable pour toutes les TPE, PME … y compris pour les commerçants ! Dont les cavistes bien sûr !
Un message qu’il nous faudra rendre récurrent en préparant des communications régionales adressées aussi bien aux agences bancaires qu’aux experts-comptables, souvent les premiers à pouvoir aiguiller les cavistes vers des solutions de financement adaptées.