La vendange 2015 est en hausse de 2% par rapport à 2014, avec 47,9 millions d’hectolitres entrés dans les caves françaises. Mais les différences sont notables entre segments, avec une baisse de 1% en moyenne sur les AOP et de 8% pour les vins sans indication géographique, une hausse pour les IGP de 5% et de 9% pour les eaux-de-vie. De quoi, enfin, commencer à reconstituer des stocks malmenés par des années de moindre production.
Détails par bassin.
Sur le millésime 2015, les disponibilités (production + stocks) au début de la campagne 2015/2016, estimées à 66,3 millions d’hectolitres (Mhl), progresseraient de 2% par rapport à la campagne précédente, tous vins confondus. Les disponibilités en AOP seraient stables sur un an. Celles en vins IGP et sans IG augmenteraient de 5%, soutenues par la récolte dynamique en vins IGP.
En Champagne : des moûts équilibrés
En Champagne, l’état sanitaire du vignoble a été très sain, sans pourriture. D’après le Comité Champagne, débutée sans incident, l’année viticole 2015 est marquée, entre fin mai et mi-août « par une chaleur et une sécheresse jamais vues lesquelles entraînent un déficit hydrique important dans certains secteurs du vignoble ». L’état sanitaire des grappes était excellent avec des moûts équilibrés montrant des degrés autour de 10,5% vol. en moyenne, et une acidité totale autour de 7 g, mais avec néanmoins une certaine hétérogénéité de maturité et d’acidité. Le rendement maximum de 10 000 kg/ha, fixé par les vignerons et maisons en juillet 2015 (auxquels s’ajouteront 500 kg/ha issus de la réserve) a été atteint dans la plupart des secteurs.
En Bourgogne : homogénéité et concentration
En Bourgogne et Beaujolais, les rendements, notamment des vins rouges, ont été affectés par la sécheresse et la canicule estivales. Bilan des courses : des volumes en deçà des attentes et des pertes atteignant en moyenne 25%. Or, ces pertes font suite à deux années déficitaires, ce qui pourrait continuer à mettre de la pression sur les stocks et les prix.
Heureusement, qualitativement, le millésime 2015 est marqué par une « grande homogénéité qualitative » et une belle concentration. Le Bureau interprofessionnel des vins de Bourgogne confirme néanmoins des volumes en rouge « en deçà des espérances », mais avec des couleurs « intenses et brillantes », avec une « belle complexité aromatiques » et « des tanins soyeux et ronds ». Les blancs sont expressifs « avec de belles notes de fruits d’été et une belle pureté aromatique ». Quant aux crémants de Bourgogne, les productions de chardonnay et d’aligoté sont « dans la normes », avec des rendements plus hétérogènes sur le pinot noir et le gamay. Au final, le millésime 2015 sur crémant s’annonce « très aromatique, intense et complexe ». Un petit bémol toutefois pour Chablis, en particulier sur les grands crus et premiers crus, avec 250 ha touchés (sur les 5400 ha du vignoble) par un violent épisode de grêle dans la nuit du 30 août au 1er septembre.
En Beaujolais, l’état sanitaire est excellent, en particulier en Côte d’Or et dans le Mâconnais.
Alsace : baisse des rendements mais qualité prometteuse
En Alsace, les vendanges se sont déroulées dans d’excellentes conditions climatiques mais les baies ont été de petite taille, conséquence de l’épisode caniculaire estival et de la sécheresse.
Les rendements sont en baisse de 2,6% environ par rapport à 2014 (-5% vs. moyenne 2010-2014), avec une récolte évaluée le 29 février à 985 271 hl, dont 699 622 hl d’AOP Alsace (-0,7%), 40 541 hl d’Alsace grands crus (+12,1%) et 245 118 hl de Crémant d’Alsace (-9,6%). « Mais la qualité est plus que prometteuse, avec un taux de sucre élevé, proche de 2003, et un niveau d’acidité proche du millésime 2011 » note l’interprofession.
En Val de Loire : un millésime fin et fruité.
Dans le Val de Loire, les pluies importantes en septembre ont précipité les vendanges. La récolte a été abondante, comparée à 2014, avec une hausse annoncée de 7% d’après InterLoire, après 3 années déficitaires. « Donc oui, c’est mieux, mais nous ne sommes pas encore dans des niveaux normaux de production », note Jean-Martin Dutour, vigneron à Chinon et président de la commission communication d’InterLoire. « Les vendanges ont été un peu plus compliquées sur les cépages précoces par rapport au tardif, mais les pluies n’ont pas impacté la qualité sanitaire. Au final, les blancs sont friands et les rouges moins concentrés que 2014 mais plus fruités. Et l’arrière-saison a été très belle pour les liquoreux », note le vigneron. « Avec la vendange 2015, les stocks devraient cesser de baisser. Mais les cavistes sont en général moins sensibles aux variations de stocks que les autres marchés car ils travaillent sur des volumes différents. L’important est de faire le constat qu’après deux millésimes compliqués, 2012 et 2013, nous avons deux millésimes mieux fournis, 2013 et 2014. »
Dans le détail, en pays nantais, les rendements sur le cépage melon sont conformes au cahier des charges après 3 années déficitaires et présentent « des degrés alcooliques modérés mais avec des trames aromatiques élégantes et expressives », note l’interprofession. En Anjou-Saumur, le duo qualité/quantité est au rendez-vous sur le chenin avec une belle maturité sur des raisins sains et des acidités faibles pour le climat ligérien. Les maturités ont pu être poussées assez loin avec des concentrations en fruits et des équilibres de bouche, précise également InterLoire. Pour les rouges de l’Anjou et du Saumurois, le millésime s’oriente sur des vins au profil léger et fruité. « La récolte des cabernets pour les rosés s’est achevée mi-octobre avec une belle richesse aromatique sur un produit très fin. Les rosé-de-loire et rosé-d’anjou issus de grolleau et de gamay seront plus aériens que l’an passé. »
En Touraine, les rendements du sauvignon sont plutôt faibles en raison de la sécheresse de fin de printemps. Mais les maturités sont « très poussées », avec des profils très frais. Même chose pour le chenin, avec une maturité qui soulignera des notes d’agrumes citronnés. Sur Chinon, les profils des vins sont gourmands et charnus en cabernet franc. Enfin, pour les rosés, les rendements sont annoncés à priori inférieurs à la moyenne.
Autre réussite du millésime 2015 en Val de Loire : les moelleux. En coteaux du layon, des degrés potentiels autour de 15-16% vol. ont été mesurés sur les premières vendanges. Sur les derniers tris réalisés en quarts-dechaume et bonnezeaux, les degrés potentiels sont montés à 23% vol. « Des richesses en sucre jamais récoltées depuis 2010 » rappelle InterLoire. Enfin, côté fines bulles, les premiers assemblages se révèlent « typés, frais, aromatiques et d’une belle structure ».
Bordeaux : production stable.Dans le Bordelais, les dernières pluies de fin août ont profité au vignoble. Les vendanges, déroulées dans de bonnes conditions, se sont achevées fin octobre. La production s’annonce à peine supérieure à celle de 2014, les pluies ayant été trop tardives pour les vins blancs. Les premières estimations diffusées mi-février par le service économie du Conseil interprofessionnel des vins de Bordeaux et les douanes permettent de dire que la récolte 2015 est stable par rapport à l’année dernière à 5,3 Mhl. Sur rouge, les analyses des raisins dévoilent un bon « potentiel en anthocyanes qui laisse entrevoir un millésime de grande qualité » d’après le BIVB. Globalement, le Sud-Ouest a profité d’une belle arrière-saison qui a permis de vendanger dans d’excellentes conditions, notamment pour les merlot et les cépages blancs. Pour le cabernet, la floraison a été un peu plus compliquée, longue et hétérogène. Au final, les volumes marquent néanmoins un peu le pas et le millésime s’annonce également de très grande qualité pour les vins liquoreux. |
Une année 2015 relativement chaudeCôté qualitatif, le millésime 2015 se caractérise par une canicule et une sécheresse estivales marquées dans l’est, et des pluies abondantes à l’ouest, en août et septembre. La floraison et la nouaison sont déroulées presque partout dans des conditions climatiques favorables. Au niveau sanitaire, et notamment dans le Gard et le Vaucluse mais aussi dans le Sud-Ouest, les attaques de black rot ont été assez fortes et ont été parfois très problématiques à gérer, en particulier en bio, et pourrait conduire à des déconversions notables. Mais globalement, la vigne a assez bien traversé la période de canicule, hormis pour les jeunes plants ou pour les vignes en sols légers ou superficiels. Néanmoins, mi-juillet, la végétation a commencé à montrer, dans certaines régions, des signes de stress hydrique, notamment dans l’Est, impactant les volumes. Les vendanges se sont déroulées dans la moyenne mais ont été relativement étalées. |
Le Languedoc : en capacité de fournir ses marchésEn Languedoc-Roussillon, la production est prévue en hausse par rapport à 2014. « Les vignerons ont le sourire », rapporte le délégué-général du CIVL, Jérôme Villaret. Le début d’été a vu quelques épisodes pluvieux conséquents, mais le temps est redevenu sec à partir de la mi-juillet. La récolte 2015 s’établirait à 13,6 Mhl, en hausse de 1,15 Mhl par rapport à 2014, et au-dessus de la moyenne décennale (13,4 Mhl). « Pour la campagne actuelle, les disponibilités du bassin Languedoc, c’est-à-dire l’ensemble de la production, devraient être maintenues à 19 millions d’hectolitres, mais la situation reste tendue avec l’équivalent de 18,2 mois de commerce, dont 12,8 mois pour la récolte 2015 et seulement 5,6 mois de stocks », détaille Christophe Jammes, en charge du service économie au CIVL. Pour les AOC du bassin, la prévision table sur 1,40 Mhl, en légère hausse par rapport à 2014 (1,35 Mhl) et 2013 (1,34 Mhl). « Là aussi, la situation reste tendue car la production devrait couvrir les sorties de chais. L’important est de voir que le Languedoc sera en capacité de fournir ses marchés, sans rupture de stock. On devrait pouvoir reconstituer l’équivalent d’un mois de stock, mais que la situation reste néanmoins tendue sur beaucoup d’appellation », poursuit Christophe Jammes. Dans le détail, Picpoul va pouvoir reconstituer un peu de stock, avec l’équivalent de 78 000 hl de commercialisation en 2015-2016 contre 70 000 en N-1. En Grés de Montpellier, les volumes seraient en baisse de 20% d’après Olivier Durand, président de l’AOC Grès de Montpellier. En Corbières, on table sur un niveau de production de 425 000 hl « avec une ambition de revenir à 450 000 hl d’ici deux ans », précise Jérôme Villaret. En Terrasses du Larzac, la production devrait couvrir la commercialisation, avec 10 000 hl. « Enfin, il est difficile encore à ce stade d’avoir une indication pour les volumes qui seront mis en rosé. Mais vu la situation et ce qui remonte du terrain, le marché est sain et ne devrait pas voir d’explosion de prix. Il restait un peu de stock l’an dernier et l’on repart donc sur une base saine pour la campagne qui débute », résume Jérôme Villaret. En vallée du Rhône : baisse en rouge.La récolte des côtes-du-rhône régionaux et villages est estimée à 1,41 Mhl par le département économique d’Inter-Rhône (-9% par rapport à 2014). Cette baisse de production en 2015 de 9% est essentiellement due aux rouges (1,211 Mhl contre 1,353 Mhl), les blancs étant en hausse de 8000 hl à 78 402 hl, et les rosés en légère baisse à 120 599 hl. Le démarrage de campagne entre août et septembre est plutôt serein en termes de prix, avec des demandes de consolidation de prix émanant des opérateurs rhodaniens suivies. Mais le millésime 2014 a permis de reconsolider les stocks qui présentent aujourd’hui un peu plus de 6 mois de commercialisation. |
Et dans les autres bassinsEn Savoie et dans le Jura, les vendanges ont eu lieu dans de bonnes conditions. Le potentiel de ces deux départements est prévu au-dessus de celui de 2014. Les crémants du Jura sont annoncés avec une acidité un peu plus faible et devront être consommés plus rapidement. Mais de façon structurelle, le Jura a perdu environ 30 000 hl en 10 ans. |
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